L'enfant Dys

Malgré les efforts et l’immense progrès de l’éducation nationale ces dernières années en matière de détection et de prise en charge des troubles dys, grâce à la mise en œuvre de plans d’aide (PPS, PAI, Auxiliaire de vie scolaire), le système a encore bien des lacunes : De nombreux parents que nous recevons se plaignent régulièrement d’un protocole complexe, de démarches longues, de l’appréhension de certains enseignants à accueillir dans leur classe une AVS. Au final, pour certains enfants, les délais pour obtenir une AVS ou un PAI peuvent aller au-delà d’une année scolaire. Cela accroît le risque d’échec scolaire pour des enfants déjà en difficulté.

Il y a encore une dizaine d’années, Dès la maternelle, particulièrement en grande section, l’enseignant repérait « un problème » : retard de langage, mauvaise latéralisation, « distrait », agité, problèmes de concentration, l’apprentissage des pré-requis de l’écrit difficile, certains enseignants parlaient de « blocage », « d’immaturité », diagnostic confortable très répandu, mais ce diagnostic une fois posé, on risquait de ne s’intéresser qu’à la sphère psychologique, par exemple, s’il existait un problème familial, le plus courant étant la séparation des parents, on envoyait l’enfant chez un psychologue, au passage les parents culpabilisaient. C’était le début du parcours du combattant pour toute la famille. Au CP l’enfant ne parvenant pas à lire, il pouvait arriver que l’on soupçonnât au mieux la mauvaise volonté de l’enfant (« il est paresseux, négligent, distrait »), au pire un déficit intellectuel. Finalement, on faisait appel à l’orthophoniste qui allait entreprendre une rééducation. Mais étant donné que certains retards dans l’apprentissage de la lecture sont courants au début et ne sont pas forcément dus à une dyslexie, l’orthophoniste, fidèle à la déontologie de sa profession, ne prononce en principe jamais le mot « dyslexie » devant les parents jusqu’à la fin du CE1 (pour annoncer une dyslexie il faut 18 mois de retard en lecture). Autrement dit, c’est au plus tôt en CE2, et dans le meilleur des cas, que les parents pouvaient identifier et nommer le « problème ». En attendant, depuis deux ans l’enfant aura subi d’une part, la pression et les discours négatifs, non seulement parfois de l’enseignant, mais de leur propre aveu, de ses parents, dépassés et angoissés par un échec qu’ils ne comprennent pas, d’autre part les moqueries des camarades de classe, la hantise de lire en public. Discours si négatifs que les enfants que nous recevions alors, nous faisaient part de leur conviction « d’être nuls », ce ressenti étant toujours d’actualité… Quant au détour d’un bilan de QI, il s’avérait que l’enfant possédait un haut potentiel, l’enfant niait systématiquement le résultat : « le psy s’est trompé ». Cette incrédulité perdurait longtemps. La blessure narcissique était toujours profonde, d’autant plus importante que les diagnostics étaient tardifs. Les adolescents étaient les plus difficiles à récupérer sur ce plan.

 Ces dernières années, l’éducation nationale a accompli d’indéniables progrès en matière de détection et de prise en charge des troubles « dys », grâce entre autres à la mise en œuvre de plans d’aide (PPS, PAI, Auxiliaire de vie scolaire, aménagement d’examens). Néanmoins, selon le discours des parents que nous recevons, les résultats ne semblent pas à la hauteur des efforts déployés. Il y a encore trop souvent une persistance des problèmes rencontrés il y a quelques années décris dans le paragraphe précédent. De plus, les parents se plaignent régulièrement de protocoles complexes, de démarches longues pour la mise en place des moyens existants, de l’appréhension de certains enseignants à accueillir dans leur classe une AVS. Au final, pour certains enfants, les délais pour obtenir une AVS ou un PAI peuvent aller au-delà d’une année scolaire. Cela accroît le risque d’échec scolaire pour des enfants déjà en difficulté.

 Autrement dit, notre action ne peut se limiter à une quelconque et simple méthodologie pédagogique mais nous devons prendre en compte systématiquement ce vécu douloureux, parfois vieux de plusieurs années, et notre premier travail, qui parfois prend quelques mois, consiste à restaurer une confiance perdue et une identité saccagée. Remettre l’enfant en réussite, lui redonner le goût d’apprendre. Mais le message doit également passer par les parents. Le désarroi de ces familles est profond : elles arrivent en général après un long parcours, à bout de souffle, et totalement désarmées.

Voir aussi L'enfant précoce-dys

Définitions-dys